Proposition du 13 septembre :

 

1.      Vous vous laissez « toucher » par un thème qui vous parle dans l’histoire de Cabrera que je vous ai racontée aujourd’hui.

 

a.      Dany : le « soin » (hôpital)/ le « non soin » (prison) côté à côte dans le même couvent

b.     Sonia : montée et chute de l’homme (montée dans la montagne et descente de la montagne) – moment de la décision du « C’est moi le chef »

c.      Françoise : réflexion et agir de l’homme confronté à l’horreur de son orgueil / Huis clos (je continue ? je continue pas ?)

d.     Pascale : perte du père et besoin d’être « entouré » (comme la signature de Cabrera) d’hommes et de rejeter d’autres hommes

e.      Esther : Regard d’un enfant sur un père qui disparaît (exil de Cabrera). Comment comprendre tant de cruauté

f.       Véronique : Je m'intéresserais bien au moment où il est presque mort (dépressif,  mais peut-être aussi empoisonné?, par une femme qui veut l'arrêter ?) et sa confrontation à sa propre mort alors qu'il l'a semée autour de lui. Il a peur et est hanté par ceux qu'il a tués. Effrayé par sa propre violence. 

g. Christine : Cabrera écrit à sa petite fille. Lourde épreuve d'introspection, il est confronté au sens à donner à ses exactions.

 

Ces thèmes qui vous « touchent » seront comme votre « intention » de travail. « J’ai envie d’écrire sur tel thème… »

 

2.      Voir comment « symboliser » par des personnages et des agirs cette « intention ».

3.      Sans trop vous soucier d’un pitch (pour l’instant), vous écririez une, deux… pages en guise de début de texte (à présenter la fois prochaine).

4.      Le personnage principal ne doit pas être Cabrera.

5.      Vous écrivez au temps que vous voulez.

6.      Pas de consigne sur le cadre « délimitation en chapitre »…

7.      Visez une histoire d’au moins 15 pages pour le mois de juin (ça peut être 100 ou 150 pages, ou 5 histoires de 15 pages…)

 

8.      Si vous avez des questions, bienvenue J

 

Note du 13 septembre :

 

(1)  Ramon fut le seul garçon du mariage de Maria Grino et de José Cabrera, un honnête marchand marin de l’immatriculation de Tortosa. De ce mariage naquirent aussi deux filles. A la mort de Jose Cabrera, Maria Grino convole en seconde noce avec un autre marin de Tortosa appelé Felipe Caldero avec qui elle aura deux filles et un fils, fratrie utérine de Cabrera.

 

 

(2)  Le 20 janvier 1837, Cabrera reçoit à Torreblanca, une décharge d’arme à feu des Christinos, de la brigade de Borso Caninati. Le projectile a traversé la fesse et s’est logé dans la cuisse. Le chef carliste fut transféré par les siens à Cuevas de Vinroma où fut extraite la balle de plomb que Cabrera conserva et que l’on peut voir aujourd’hui dans la collection du musée de l’armée de Madrid.

Visiblement une année à champignons dans les montagnes de la Tinença... A placer dans une histoire de Cabrera ? Benoît le 02/10/14 

Le Monastère de Benifassa se trouve à

LAT 40°40'37.41'' N

LON 0°11'53.37'' E

Cabrera mesurait 1 m 63 :-)

 

On l'apprend dans un texte de Pierre Dupuis, chargé de la garde de Cabrera à son arrivée à Paris après avoir quitté l'Espagne.

 

Je suis chargé de la garde du fameux général Carliste Cabrera, il est arrivé aujourd'hui 17 à 6h du matin accompagné de son aide de camp, un domestique et deux gendarmes qui l'ont amené de Paris en poste, l'aide de camp aurait désiré rester avec son général on ne lui laisse que son domestique, il occupe la chambre de Mr Peyronnet (ministre sous Charles X), aucun d'eux ne parle le français, Cabrera a cinq pieds un pouce (1m63), il est maigre et pâle, parait très souffrant - depuis plusieurs mois il tousse souvent et crache du sang, il est né en 1809, je crois que s'il reste un an à ham il pourra bien y laisser sa peau"". Pierre Dupuis annonce par ailleurs qu'il a reçu le 5 juillet une lettre de son ""ancien"" (son frère aîné Ambroise): ""il loge maintenant sur la place royale 6 au marais sur le même palier de Mr Victor Hugo. Je crois, et toi aussi, que quand même il coucherait dans un de ses caleçons pour en être plus rapproché il n'en serait pas moins bête pour cela"". Pierre recopie la description détaillée de l'appartement que lui en fait Ambroise, qui précise qu'il ""n'a pas tout à fait 700 francs de loyer"". Ramón Cabrera y Griño était né en fait le 27 décembre 1806 à Tortosa et avait donc alors 33 ans. Fils de pauvres marins, il fut placé comme clerc chez un chanoine de la cathédrale, mais le sous-diaconat lui fut refusé lorsqu'il eut 24 ans car il s'était révélé paresseux, débauché et querelleur. Il participa à une conspiration contre Isabelle II en 1833, fut découvert, s'enfuit dans les montagnes et rejoignit les partisans de Don Carlós de Bourbon, qui revendiquait le trône, s'engageant par pur opportunisme, sans la moindre conscience politique. Devenu Sergent, il quitta l'armée carliste avec des soldats sous ses ordres, répandit la terreur en Aragon en se réclamant faussement de Don Carlos et se fit proclamer Général par sa troupe, qui compta jusqu'à 10.000 hommes. Il combattit également dans la province de Valence et remporta d'importantes victoires, essentiellement pour son propre compte, à tel point que Don Carlos confirma son grade de Général, le nomma Comte, Lieutenant-Général et Gouverneur général des provinces d'Aragon, de Valence et de Murcie. Quand Don Carlos dut abandonner la lutte, il poursuivit la sienne. Mais le 6 juillet 1840, il fut rejeté avec les débris de sa troupe sur le sol français, arrêté et conduit à Ham; il fut libéré quelques mois après.

L'Espagne au 19ème siècle vue par Victor Hugo qui évoque Ramon Cabrera

 

"Je suis en Espagne. J'y ai un pied du moins. Ceci est un pays de poètes et de contrebandiers. La nature est magnifique ; sauvage comme il la faut aux rêveurs, âpre comme il la faut aux voleurs. Une montagne au milieu de la mer. La trace des bombes sur toutes les maisons, la trâce des tempêtes sur tous les rochers, la trace des puces sur tous les chemins ; voilà Saint-Sébastien." Victor Hugo, "Les Pyrénées"

  

Le 18 juillet 1843, Victor Hugo quitte Paris pour aller prendre les eaux à Cauterets (Hautes-Pyrénées). Avant de gagner la station thermale, il s'attarde en Espagne et visite le Pays basque. Il s'agissait pour Victor Hugo de son second séjour en Espagne, car l'auteur de "Notre-Dame de Paris" y était déjà allé, à l'âge de neuf ans, en 1811, avec sa mère et ses deux frères, pour rejoindre un père, Léopold Hugo, alors général de brigade en poste à Madrid, au service de Joseph Bonaparte, roi d'Espagne. Dès la frontière passée, Victor Hugo découvre, en cette année 1843, un pays ravagé par six ans de guerre civile, guerre qui a opposé entre 1833 et 1839, les partisans de la reine Isabelle à ceux de don Carlos, frère de feu le roi Ferdinand VII.

  

"Cette guerre a laissé des traces partout. Au milieu de la plus belle nature et de la plus belle culture, parmi des champs de tomates qui vous montent jusqu'aux hanches, parmi des champs de maïs où la charrue passe deux fois par saison, vous voyez tout à coup une maison sans vitres, sans porte, sans toit, sans habitants. Qu'est cela ? Vous regardez. La trace de l'incendie est sur toutes les pierres du mur. Qui a brûlécette maison ? ce sont les carlistes. Le chemin tourne. En voici une autre. Qui a brûlé celle-ci ? Les cristinos. Entre Hernani et Saint-Sébastien, j'avais entrepris de compter les ruines que je voyais de la route. En cinq minutes, j'en ai compté dix-sept. J'y ai renoncé.

 

(...) Cette guerre de 1833 à 1839 a été sauvage et violente. Les paysans ont vécu cinq ans disperséss dans les bois et dans la montagne, sans mettre le pied dans leurs maisons. Tristes instants pour une nation que ceux où le 'chez soi' disparaît. Les uns étaient enrôlés, les autres en fuite. Il fallait être carliste ou cristino. Les partis veulent qu'on soit d'un parti. Les cristinos brûlaient les carlistes, et les carlistes les cristinos. C'est la vieille loi, la vieille histoire, le viel esprit humain.

 

(...) Ferdiand VII n'aimait pas don Carlos, et le craignait. Il l'accusait de conspirer sous son règne ; ce qui n'était pas. Pourtant la dernière personne que le roi Ferdinand voyait tous les soirs avant de s'endormir c'était son frère. A minuit, don Carlos entrait, baisait la main du roi, et sortait, souvent sans que les deux frères eussent échangé une parole.

 

Les gardes du corps avaient ordre de ne laisser rentrer à cette heure dans la chambre royale que don Carlos et le fameux père Cyrillo. Ce père Cyrillo avait de l'esprit et des lettres. C'est un profil qui eût valu la peine d'être dessiné entre deux pareils princes et deux pareils frères. Les partis l'ont défiguré à fantaisie avec une étrange fureur.

 

(...) A vai dire, don Carlos fut perdu comme prétendant le jour où Zumalacarregui mourut. Zumalacarregui était un vrai Basque. Il était le noeud du faisceau carliste. Après sa mort, l'armée de Charles V ne fut plus qu'un fagot délié, comme dit le marquis de Mirabeau. Il y avait deux partis autour de don Carlos, le parti de la cour, 'el rey neto', et le parti des droits, 'los fueros'. Zumalacarregui était l'homme des 'droits'. Il neutralisait près du prince l'influence cléricale ; il disait souvent : 'El demonio los frayles !' Il tenait tête au père Larranaga, confeseur de don Carlos. La Navarre adorait Zumalacarregui. Grâce à lui, l'armée de don Carlos compta un moment trente mille combattants réguliers et deux cent cinquante mille insurgés, répandus dans la plaine, dans la forêt et dans la montagne.

 

(...) La guerre de Navarre finit en 1839, brusquement. La trahison de Maroto, payée, dit-on, un million de piastres, brisa l'armée carliste. Don Carlos, obligé de se réfugier en France, fut conduit jusqu'à la frontière à coup de fusil."

 

Les carlistes sont vaincus. Don Carlos expulsé (c'est la troisième fois) (1) se réfugie à Bourges, tandis que le courageux mais malheureux général carliste Ramon Cabrera, entre en Roussillon avec dix-mille hommes. Une armée de débâcle qui joue de la guitare, une carcasse d'armée où se mêlent les vieillards, les enfants et leurs mùères, où se mêlent aussi tous ceux qui s'y faufilent, tels les Trabucayres. bandits dont le nom vient de trabuc ou tromblon, fusil court dont la gueule est évasé en forme d'entonnoir.

 

(1) Exilé avec sa famille à Valençay (Indre) par Napoléon Ier qui nomme, en 1808, son frère, Joseph roi d'Espagne. Exilé une seconde fois par son propre frère Ferdinand VII, et enfin en 1840 exilé à Bourges après la défaite des Carlistes.

 

Cet article a été réalisé grâce à la lecture du récit de Victor Hugo sur son voyage en Espagne en 1843 et intitulé "Les Pyrénées".

La première édition de l'Atelier Cabrera (2014-2015) fut un réel bonheur. Juin 2015, les participants peaufinent la mise en page du recueil de leurs textes en tous points magnifiques. A paraître dans les semaines à venir. Le bonheur vécu lors de l'Atelier 2014-2015 m'invite à reconduire la démarche en 2015-2016.